Créer la sécurité psychologique des équipes

Comment développer la sécurité psychologique des équipes ? Dans cette publication je vous livre les 8 leviers actionnables indispensables pour mettre vos équipes dans un état de sécurité psychologique inébranlable.

Créer la sécurité psychologique des équipes
Photo de Joël de Vriend

La sécurité est la "situation de quelqu'un qui se sent à l'abri du danger, qui est rassuré" (Larousse). Bon, qu'on se le dise, nous ne sommes jamais vraiment en sécurité. Mais autant essayer que les risques ne viennent pas de l'intérieur. Et dans cette dynamique, le rôle du manager est central.

Dernièrement j'avais écrit un article sur les 8 techniques de torture psychologique et de manipulation de Biderman et les premiers mécanismes que le manager pouvait mettre en place pour prendre le contre pied des effets négatifs.

Aujourd'hui, je vais plus loin dans le détail et vous donne une véritable feuille de route à suivre pour vous en servir comme outil de construction de la sécurité psychologique de vos équipes.

Voici le sommaire des points abordés, si vous souhaitez y accéder directement :

  1. Favoriser la collaboration
  2. Adopter une posture d'adulte
  3. Maintenir une éthique solide
  4. Maîtriser ses émotions
  5. Encourager le droit à l'erreur
  6. Faire preuve de constance et congruence
  7. Responsabiliser les équipes
  8. Donner du sens

1. Comment développer la collaboration lorsque l'on est manager ?

Je considère la collaboration ici au sens large. Autant dans les affaires quotidiennes que dans les projets qui pourraient survenir plus sporadiquement. Le grand intérêt de la collaboration est triple :

  • créer un sentiment d'appartenance à un ensemble,
  • créer une interconnexion (attention à l'interdépendance),
  • permettre le transfert, l'amélioration, voire la rectification de certaines compétences.

Je vais être direct (pour changer un peu) : tout devrait être prétexte à la collaboration dans vos équipes.

C'est un sujet central et sérieux qui ne s'approche pas à la légère.

L'un des pré-requis fondamentaux est la définition des grands sujets et thématiques du service : vous devez savoir avec clarté et précision les grands chantiers à mener.

Je parle ici au-delà des objectifs, qui ne sont que des buts à atteindre avant les prochains. Le fait de connaître et maîtriser ces grands sujets vont vous permettre de rassembler les individus en "assemblant" les compétences nécessaires à la bonne appréhension de chacun d'entre eux.

Ensuite, les outils sont assez connus, je vous les liste à nouveau pour être certain que vous les gardiez en mémoire :

  • atelier de réflexion collective (brainstorming)
  • coaching / mentorat transverse (inter service par exemple)
  • chefferie de projet, délégation

Le plus important sur l'aspect de la collaboration n'est pas nécessairement le nombre d'ateliers ou d'outils que vous allez utiliser, mais surtout la philosophie avec laquelle vous allez le faire.

Si votre démarche de développer la sécurité psychologique de vos équipes est sincère, vous devrez permettre la libre expression au cours de tous ces temps collaboratifs.

Attention, je n'ai pas dit que tout était acceptable et que chacun pouvait y aller de son commentaire, l'idée est plutôt ici de considérer ce que vos subordonnés ont à dire car, ce sont eux qui porteront le(s) projet(s).

2. Comment adopter une posture d'Adulte, rationnel, pragmatique et factuel ?

En analyse transactionnelle (AT), la posture d'Adulte désigne l'état du "Moi" dans lequel l'individu se comporte en pleine rationalité réalisme et présence dans l’instant présent.

L'Adulte est donc capable d'analyser objectivement la réalité et prendre des décisions en fonction de faits, à se montrer ouvert et pragmatique. Il incarne l'équilibre entre les dimensions émotionnelles (qui dominent dans les états "d'Enfant" et de "Parent") et la logique. Vous pouvez considérer "l'Adulte" comme le “patron interne” qui va réguler les messages émotionnels de "l’Enfant" et les normes du "Parent" pour s’adapter au contexte de manière efficace. Retrouvez l'article complet sur l'Analyse Transactionnelle au service management.

Pour un manager, cette posture devient donc particulièrement cruciale lorsqu'il s'agit d'établir un comportement juste et congruent au quotidien sans se laisser aller au favoritisme. L'objectif : assurer la cohérence des messages, encourager un climat de confiance et de respect au sein de l’équipe.

C'est dans chaque interaction qu'en tant que manager vous devez montrer votre capacité à rester objectif et centré sur les faits. Voici quelques formulations qui vous permettront de vous inscrire en posture d'adulte:

Un manager en posture adulte communique de façon directe, claire et bienveillante, et il assume ses responsabilités en s’appuyant sur les faits tout en montrant de l’empathie.

Je vous liste, ci-dessous, des exemples de phrases en posture "d'Adulte" que vous pourrez utiliser selon les contextes à traiter :

  • contexte de délégation : "Je vous fais confiance pour gérer ce projet, et je souhaite que l'on reste en contact pour ajuster ensemble si nécessaire. Comment souhaitez-vous qu'on organise nos points d’étape ?"
  • contexte de conflit ou de tension : "J’ai remarqué que nous avons eu quelques incompréhensions lors de nos derniers échanges. Je te propose d'en parler pour que chacun puisse clarifier son point de vue."
  • contexte de feedback : "Sur ce projet, j’ai constaté des points très positifs, notamment sur [point spécifique]. Par contre, je pense que nous pouvons améliorer certains aspects pour être encore plus efficaces, comme [exemple concret]. Qu'en penses-tu?"
  • contexte de demande précise : "Ce dossier est prioritaire et doit être finalisé d’ici vendredi. Est-il possible que tu fasses une dernière vérification des détails d'ici jeudi et que l'on fasse un point ensemble avant la remise ?"
  • contexte de désaccord sur une décision : "Je comprends ta perspective et les raisons qui te motivent. De mon côté, je pense qu'il serait plus bénéfique de [solution proposée]. Voyons ensemble comment on peut combiner nos points de vue pour obtenir le meilleur résultat."
  • contexte d'expression de ses propres limites : "Je suis disponible pour t'accompagner, mais aujourd’hui, je n’aurai qu’une heure pour qu’on avance ensemble."
  • contexte d'autonomisation de l'équipe : "Tu as tout mon soutien pour prendre des initiatives sur ce sujet. Si tu rencontres des obstacles, je serai là pour en discuter et trouver des solutions ensemble."
  • contexte de félicitations : "Bravo pour le travail que tu as fourni ! je voudrais te poser une question pour ancrer cette victoire : quels sont, selon toi, les facteurs clés de ce succès ?"
  • contexte de recadrage : "Il y a eu une erreur dans [situation spécifique], et je comprends que cela puisse arriver. L’important, c’est de comprendre ce qui n’a pas fonctionné pour éviter que cela se reproduise. Que pourrais-tu proposer pour corriger ça ?"

3. Comment maintenir une éthique solide, notamment sur la santé mentale ?

Qu'est-ce qu'une éthique solide en management ? Au-delà de votre management, il est surtout question de vous, ici.

Une éthique solide en management repose sur les (vos) principes et les (vos) valeurs qui vont guider vos décisions et interactions avec vos collaborateurs.

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Du consensus général, il est souvent question : du respect dû aux individus, de la justice et de l'équité, de l'intégrité et de l'honnêteté, de la responsabilité et de l'exemplarité, et la confidentialité.

Mais alors, comment manifester l'éthique en management ?

Voici mes conseils, critère par critère :

  • Respect des individus : prenons l'exemple d'une prise de décision. En tant que manager éthique qui souhaite créer de la sécurité psychologique pour ses équipes, vous pourriez prendre en considération les points de vue de toutes les parties concernées, même si ceux-ci diffèrent du vôtre. L'idée étant de les valoriser quand bien-même vous ne les retiendrez pas. Attention ici à ne pas tomber dans une vilaine manipulation qui viendrait à décider, a priori, que vous ne retiendrez aucun avis mais à les écouter malgré tout pour les "valoriser". Deux comportements indispensables : remerciez les personnes ayant fourni des contributions et motivez tous les refus (éventuels) de vous en servir.
  • Justice et d'équité : de la répartition des tâches aux opportunités de croissance et aux récompenses, tout est sujet sujet à manifester votre sentiment de justice et d'équité. Il est d'ailleurs très important que vous communiquiez sur les mécaniques que vous appliquez, pour leur donner encore plus de poids et de considération. L'une des manifestations les plus pertinentes est sans aucun doute la manière dont vous conduisez et dont vous vous conduisez lors des entretiens annuels d'évaluation. Je vais être clair et direct : nous avons tous nos "chouchous", nos "préférés", des personnes que l'on apprécie particulièrement car elles partagent nos valeurs, notre tempérament ou tout simplement nos idées. La première chose à faire dans ce cas serait déjà d'identifier avec sincérité ces individus et de prendre conscience de l'éventuel favoritisme auquel ils auraient droit, pour ensuite réajuster.
  • Intégrité et honnêteté : "prendre sa part", en tant que manager, est le mot-clé sur ce critère. Soyez transparent dans vos communications, ne manipulez pas l'information pour accentuer ou minimiser votre rôle. Enfin, prenez vos responsabilités (on en parle juste en dessous) en reconnaissant vos erreurs.
  • Responsabilité et exemplarité : le manager éthique assume pleinement ses responsabilités et agit comme un modèle de comportement pour l’équipe. Le principe est simple : incarner les valeurs que vous promouvez. Pour exemple, si vous avez dû prendre une décision difficile à accepter pour l'équipe, ne faites pas porter la responsabilité sur votre management ou le concept flou de "la Direction". Il y a fort à parier qu'une fois l'émotion négative instantanée évacuée par l'équipe, le sentiment de confiance envers vos propos soit augmenté.
  • Respect de la confidentialité et des limites professionnelles : je ne m'étale pas sur celui-ci, même si j'ai horreur de cette phrase, je vais tout de même l'écrire : "c'est du bon sens". Exemple d'un employé qui confierait un problème personnel affectant sa performance. Dans ce cas, votre rôle est d'écouter avec empathie, éventuellement proposer du soutien, et surtout veiller à ce qu'aucune information ne fuite.

Pour conclure sur cette partie éthique, je me dois de lier ce concept avec celui de RSE. Ayant déjà traité le sujet, voici l'article si jamais vous souhaitiez approfondir le rôle du manager dans la RSE.

4. Comment maîtriser ses émotions ?

Pour être honnête, je réalise en l'écrivant que ce titre est trompeur. On ne maîtrise pas les émotions, on maîtrise les comportements qu'elles pourraient impliquer. Bien entendu il est possible de travailler en amont sur vos états de santé physique et mentale, et ces derniers aideront grandement à la "gestion" de vos émotions, peut-être votre santé ira jusqu'à empêcher l'apparition d'une émotion. Mais gardez en tête qu'une fois une émotion générée dans votre corps, vous ne serez pas en mesure de l'attraper par la nuque pour la soumettre

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Vos meilleures armes restent ici : la respiration profonde et le temps de recul avant quelque réaction que ce soit.

Les émotions sont des réactions, et donc des indicateurs. Elles vous indiquent comment vous vous situez, en terme de valeurs et de principes de vie, vis-à-vis de ce que vous avez vécu, vu ou entendu. Elles sont à la fois générées par le contexte ET votre état interne, lorsqu'ils se rencontrent.

Enfin, pour conclure sur ce point, toutes vos émotions sont acceptables. Gardez en tête que ce sont leurs traductions dans le monde physique en termes de comportement qui peuvent (vous) porter préjudice.

Quel Manager êtes-vous ?
Ce test de 20 questions vous permet de découvrir une première approche de votre style de management et de répondre à la question : “quel type de Manager suis-je réellement ?”

5. Comment encourager, et se servir, du droit à l'erreur ?

Postulat initial de réflexion : l'erreur est le fait de faire mal car ne sachant pas, la faute est le fait de faire mal, sachant que c'est mal faire.

En tant que manager, ce qui va compter au-delà du droit à l'erreur, est ce que vous allez faire de cette erreur, dans les actes.

Chaque erreur doit connaître un processus précis d'exploitation et être perçue (et traitée) comme une opportunité d’apprentissage. Tout ceci est entre vos mains de manager.

Pour toute erreur commise, l'action première étant, bien entendu, d'en discuter avec le collaborateur concerné pour le faire travailler / mûrir sur cette erreur. Vous pourriez d'ailleurs revêtir, pour ce temps d'échange, votre habit de coach et vous servir de l'outil G.R.O.W, par exemple.

Ensuite, il pourrait être intéressant, que vous chargiez le collaborateur ayant commis l'erreur d'éduquer le reste des équipes en lui délégant un atelier de formation. Il n'est pas question de sortir l'artillerie lourde avec 4 h de réunion, mais simplement un point de 45/60 minutes, pour lequel il viendrait préparé et au cours duquel les autres équipes pourraient poser leurs questions.

L'objectif ici étant de montrer aux équipes comment toute erreur peut devenir un chemin de croissance personnel et collectif.

6. Comment faire preuve de constance et de congruence ?

Mais de quoi parle-t-on ?

  • Congruence : fait de coïncider, de s'ajuster parfaitement. (Larousse)
  • Constance : patience, persévérance de quelqu'un, entretenue par une force morale sans défaillance : Poursuivre un dessein avec constance. (Larousse)

Nous aurions donc un manager qui "coïncide", qui "s'ajuste" parfaitement", qui est aligné (avec lui-même). Un cadre patient, persévérant entretenu par une force morale sans défaillance.

Prenez un instant pour imaginer quel impact ce type de management pourrait avoir sur les équipes...Voici une vérité pour vous : plus vous êtes prévisible plus vous créez de la sécurité psychologique pour vos équipes.

Les employés se sentent d'autant plus en sécurité psychologique que leur manager se montre stable et constant dans ses réactions.

J'ai conscience qu'atteindre un niveau de congruence et de constance élevé est un vrai défi, qui peut parfois prendre une vie et de nombreuses séances de coaching ou de thérapie.

Aussi, voici quelques ajustements "physiques" qui vous aideront :

  • établissez des routines de vérification des éléments clés, votre équipe comprendra sans même y penser que ces derniers sont particulièrement importants car automatiquement vérifiés,
  • traitez les situations de manière systémique, créez un véritable procédé de traitement, écrivez-le,
  • travaillez votre humeur (je vous renvoie au point n°4 sur les émotions),
  • Entretenez de manière active et soutenue la communication au sein de vos équipes

Enfin, vous pouvez également organiser des ateliers croisés, j'en parle dans l'article sur la place de la théorie en entreprise.

7. Comment responsabiliser les équipes ?

L'idée est ici de casser la dynamique potentielle dans laquelle vous pourriez tomber avec vos équipes de ce chef omnipotent qui sait tout, résout tout et répare tout.

La responsabilisation des équipes vient avec le concept de périmètre de responsabilité, c'est à dire ce qui est attendu des équipes et plus spécifiquement pour chacun des individus présents.

Deux grands leviers actionnables sur ce critère :

  1. Donnez toujours la priorité de traitement d'une situation au "propriétaire" de celle-ci. Que ce soit une situation positive ou problématique, la première personne que vous devez laisser en charge de son traitement est le collaborateur assigné. Il est entendu que si son niveau hiérarchique n'est pas suffisant pour solutionner, vous interviendrez, mais dans le cas contraire, non.
  2. Déléguez, à chaque fois que cela est possible, des responsabilités aux collaborateurs. Attention à ne pas créer l'inverse du résultat escompté en ne sachant pas déléguer. La délégation est une compétence du manager qui s'apprend et s'encadre, pensez à consulter l'article "réussir sa délégation". En d'autres termes, assignez clairement l'objectif, les rôles, la délimitation temporelle et les ressources nécessaires.

8. Comment donner du sens à l’action ?

Ah le sens...il est sur toutes les lèvres depuis des années. Et c'est un vrai casse tête pour les managers.

Soyons clairs, le premier sens qui est donné est celui relatif à la raison pour laquelle un collaborateur se rapproche d'une entreprise pour y travailler. Mais ici, il n'est pas question de ça.

Le sens dont je traite dans cette publication est bien entendu, le "pourquoi" ou "pour quoi", une action est effectuée. J'appelle cela le système de la poupée russe : chaque action individuelle, s'intègre dans une action d'équipe qui s'intègre dans une action de service qui s'intègre dans une stratégie qui s'intègre dans la vision de l'entreprise.

Comme souvent en management, l'idée est de montrer systématiquement, inlassablement, à quoi sert l'action menée, ce qu'elle va permettre d'accomplir par la suite, de créer une continuité et une logique intellectuelle dans le cerveau de vos subordonnés.

2752 mots jusqu'ici.

Je m'arrête là.

Tous mes vœux de succès.

Olivier KAMEL


Que vous souhaitiez faire un point sur vos pratiques, que vous soyez face à un défi managérial, ou encore que vous souhaitiez vous lancer sur un chemin de transformation, je vous offre 30 minutes de mon temps pour en discuter avec vous.

Quel coach pour m’aider en management ?
Olivier Kamel est spécialiste du management depuis 2013 et coach professionnel de managers (accrédité ACC par l’ICF).